Les années 1980 ont vu l’essor de deux hypothèses concurrentes en ce qui concerne la brutale disparition des dinosaures non aviensdinosaures non aviens il y a 66 millions d’années. La première faisait intervenir la chute d’un petit corps céleste d’environ 10 kilomètres de diamètre. La matièrematière sous forme de poussière éjectée par l’impact creusant un astroblèmeastroblème aurait alors bloqué le rayonnement solaire, provoquant un effondrementeffondrement de la chaîne élémentaire.
Le scénario alternatif repose lui aussi sur un effondrement de la biosphère, mais provoqué par des émissionsémissions de gazgaz – essentiellement du CO2 – pendant quelques millions d’années, issues des colossales éruptions fissurales à l’origine des plateaux basaltiquesbasaltiques du Deccan, en Inde. Au début des années 1990, on découvre enfin le cratère d’impact géant prédit par le premier scénario. Il se trouve dans la région entourant la ville de ChicxulubChicxulub Puerto, dans la péninsule du Yucatán, au Mexique.
Extrait du programme NOVA de 1981. Pendant 150 millions d’années, les dinosaures ont dominé la Terre. Puis, il y a 65 millions d’années, ils ont soudainement disparu, ainsi qu’une grande partie de la vie animale et végétale de la planète. NOVA examine une théorie remarquable sur la cause de la catastrophe, dans laquelle le premier indice de la solution était un morceau d’argile. Luis Alvarez y postule que l’extinction massive des dinosaures et de nombreux autres êtres vivants au cours de l’extinction du Crétacé-Paléogène a été causée par l’impact d’un gros astéroïde sur la Terre. Avec son fils, le géologue Walter Alvarez, il a développé l’hypothèse selon laquelle l’extinction qui a anéanti les dinosaures était le résultat d’un impact d’astéroïde. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l’écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © GBH Archives
Les quatre mousquetaires de la théorie de l’impact cosmique
Depuis, même si la majorité des géologuesgéologues favorisent l’hypothèse de l’impact, les débats continuent quant à savoir quel scénario est vraiment l’explication principale. Des données ont ainsi laissé penser que la phase principale des éruptions du Deccan est postérieure à la fameuse limite KT (Crétacé-Tertiaire), marquant par une strate mondiale la fin des dinosaures. D’autres suggèrent que c’est la chute du corps céleste qui en générant des ondes sismiquesondes sismiques a boosté, de l’autre côté de l’hémisphère, l’activité volcanique des Deccan (du fait de la dérive des continents, l’Inde se trouvait alors au-dessus du point chaudpoint chaud de l’île de La Réunion). Enfin, certains avancent qu’il y a bien deux tueurs, mais que l’impact d’un astéroïdeastéroïde ou d’une comètecomète n’a été que le coup de grâce à une biosphère déjà bien affaiblie par les éruptions volcaniqueséruptions volcaniques massives.
Pour compliquer le tableau, les données paléontologiques suggéraient depuis quelque temps que la biodiversitébiodiversité des dinosaures était déjà en déclin depuis presque 10 millions d’années, laissant penser qu’un troisième tueur était aussi présent, par exemple avec des régressions marines comme celle de la mer de Niobrara ou la mer intérieure nord-américaine. Une immense mer qui divisait l’Amérique du Nord en deux continents (l’Appalachia et la Laramidia) pendant le milieu et la fin du Crétacé.
Le saviez-vous ?
Rappelons que la première découverte de la fameuse strate noire de la limite K-T a été faite par Walter Alvarez arpentant vers le milieu des années 1970 la région de Gubbio, une ville italienne. Il était alors un jeune géologue fraîchement émoulu de l’université de Berkeley, dont l’attention avait été retenue par une strate argileuse sombre montrant la disparition subite du plancton marin, pourvoyeur en carbonates. Elle délimitait précisément l’époque où disparaissaient aussi les grands reptiles marins, les dinosaures, les ammonites et les bélemnites.
Avec l’aide de son père, le prix Nobel de physique Luis Alvarez et surtout des chimistes Frank Asaro et Helen Michel, tous de l’université de Berkeley, il entreprit de faire parler la couche en la datant et en l’analysant précisément. Et c’est ainsi que tous ces chercheurs découvrirent à leur grande stupéfaction que cette strate contenait une quantité anormalement élevée d’un élément rare à la surface de la Terre, l’iridium. Ce métal est en revanche assez abondant dans les comètes et les astéroïdes. C’est pourquoi Walter Alvarez n’hésita pas à proposer avec ses collègues, en 1980, que la crise biologique survenue il y a 66 millions d’années était due à la chute sur la planète d’un petit corps céleste. La découverte au début des années 1990 de l’astroblème de Chicxulub allait leur donner raison, malgré le scepticisme initial d’une bonne partie de la communauté des géosciences.
Certains chercheurs en tiraient encore une autre conclusion, à savoir que même sans ces événements, les dinosaures évoluaient naturellement vers leur extinction. C’est justement cette dernière hypothèse qui vient d’être exposée sous un jour nouveau via un article publié dans Current Biology. Il est le produit d’un travail de recherche mené par des membres du célèbre University College de Londres (UCL) qui publie un communiqué accompagnant l’article.
Un biais dans la conservation et la formation des roches fossilifères du Crétacé
L’auteur principal, Chris Dean, y explique que : « Cela fait débat depuis plus de 30 ans : les dinosaures étaient-ils condamnés et déjà en voie de disparition avant l’impact de l’astéroïde ?
Nous avons analysé les archives fossilesfossiles et constaté que la qualité des archives de quatre groupes de dinosaures (cladesclades) se dégrade au cours des 6 derniers millions d’années précédant l’impact. La probabilité de trouver des fossiles de dinosaures diminue, tandis que la probabilité que des dinosaures aient vécu dans ces régions à cette époque reste stable. Cela montre que nous ne pouvons pas prendre les archives fossiles au pied de la lettre.
La moitié des fossiles dont nous disposons de cette époque ont été découverts en Amérique du Nord. Nos résultats suggèrent que, dans cette région du moins, les dinosaures se portaient peut-être mieux que ce que l’on supposait avant l’impact de l’astéroïde, avec potentiellement une diversité d’espècesespèces plus élevée que celle observée dans les archives géologiques brutes. »
Pour atteindre ce résultat, les spécialistes en géosciences ont analysé les données concernant plus de 8 000 fossiles d’Amérique du Nord provenant d’êtres qui vivaient au cours des 18 millions d’années précédant l’impact de l’astéroïde, à la fin du Crétacé. Ils ont montré qu’il ne fallait pas en conclure naïvement que le nombre d’espèces de dinosaures avait atteint son apogéeapogée il y a environ 75 millions d’années, puis avait diminué au cours des 9 millions d’années précédant l’impact de Chicxulub.
Toujours dans le communiqué de l’UCL, Alessandro Chiarenza, co-auteur de l’article et qui avait déjà travaillé sur la diversité et l’extinction des dinosaures à la fin du Crétacé, ajoute : « Dans cette étude, nous démontrons que ce déclin apparent résulte plus probablement d’une fenêtrefenêtre d’échantillonnageéchantillonnage réduite, causée par des changements géologiques dans ces couches fossilifères du MésozoïqueMésozoïque terminal – induits par des processus tels que la tectonique, le soulèvement des montagnes et le recul du niveau de la mer – plutôt que de véritables fluctuations de la biodiversité.
Les dinosaures n’étaient probablement pas inévitablement condamnés à l’extinction à la fin du Mésozoïque. Sans cet astéroïde, ils pourraient encore partager cette planète avec les mammifèresmammifères, les lézards et leurs descendants survivants : les oiseaux. »
En clair, les dinosaures – notamment en Amérique du Nord – semblaient en déclin, mais il s’agissait d’un biais causé par le fait que les conditions de fossilisationfossilisation avaient changé et qu’il était plus difficile d’avoir des roches témoignant de la présence des dinosaures. Mais en analysant cette présence à l’échelle des régions étudiées, on trouve que la proportion de territoire probablement occupé par les quatre clades de dinosaures les clades de dinosaures d’Amérique du Nord : Ankylosauridae (herbivoresherbivores à cuirasse, comme l’Ankylosaurus à queue bottée), Ceratopsidae (grands herbivores à trois cornes, comme le Triceratops), Hadrosauridae (herbivores à becbec de canard, comme l’Edmontosaurus) et Tyrannosauridae (carnivorescarnivores, comme le TyrannosaurusTyrannosaurus-Rex) est restée globalement constante, ce qui suggère que leur zone d’habitat était restée stable et que le risque d’extinction était resté faible, ce qui oriente bien vers l’hypothèse d’un biais dans les roches récoltées.