Étudier des squelettes inhumés depuis des siècles et abîmés par le temps est une tâche complexe, mais révélant souvent des secrets passionnants. C’est le cas d’un individu retrouvé sous un monastère antique de Jérusalem, les archéologues pensant initialement avoir découvert un moine byzantin, avant de comprendre qu’il pourrait s’agir de l’une des premières nonnes retrouvées à ce jour.
Depuis de nombreux siècles, Jérusalem est une ville attirant des pèlerins du monde entier, bénéficiant d’un statut de cité sainte depuis l’Antiquité. Dans le nord de la métropole israélo-jordanienne, le monastère de Khirbat el-Masani dissimulait bien des secrets, qui continuent de captiver les archéologues et les historienshistoriens. En janvier 2023, il était annoncé par Ancient Origins que la dépouille d’un moine croulant sous les bijoux avait été exhumée lors de fouilles au cœur de l’édifice byzantin. Deux ans plus tard, retournement de situation : l’individu est en réalité une femme, comme le démontre une étude à paraître en avril 2025 dans le Journal of Archaeological Science.
L’identification grâce à la dentition
Pour acquérir le plus de données possible concernant l’individu déterré à Khirbat el-Masani, les scientifiques ont examiné avec le plus grand soin deux parties bien spécifiques du squelette. Dans un premier temps, la disposition des vertèbres permettait d’établir une fourchette sur l’âge de la personne au moment du décès, entre 20 et 60 ans. Une marge élevée que l’étude de la dentition affinait au fil des semaines.
Dans la tombe rudimentaire, quelques fragments parcellaires du crânecrâne subsistaient. La seconde prémolaire se trouvant sur la partie supérieure gauche de la mâchoire offrait cependant aux légistes une chance supplémentaire pour identifier le corps. Selon les chercheurs, la constitution et les altérations observées sur la dent laissent supposer que l’individu ait eu environ 30 ans au moment de sa mort. Dans l’émailémail, des détails substantiels affinent la connaissance du squelette. Lors de l’examen de la dent en laboratoire, la présence d’acides aminésacides aminés, ou peptidespeptides, nommés AmelX, était relevée, puis quantifiée. Les auteurs de l’article indiquent que l’AmelX est corrélée à un gènegène, lui-même associé aux chromosomes XX. Suffisamment de preuves pour affirmer que l’individu, inhumé au cours du Ve siècle, était donc une femme !
De l’ascétisme des femmes durant l’Antiquité
Au moment des excavations, les archéologues pensaient donc avoir mis la main sur les ossements d’un moine byzantin. En témoignaient les kilos de bijoux et d’ornements venant « habiller » la dépouille. Les moines byzantins les plus dévots se dépouillaient et pratiquaient l’ascétisme tandis que l’Empire romain oriental prospérait, se consacrant à la foi dans des monastères. Un courant appelé monachisme, généralement attribué aux hommes.
Pourtant, ces récentes découvertes donnent lieu à de nouvelles réflexions entourant l’émergenceémergence de courant religieux féminin durant l’Antiquité. C’est à cette période que les premières nonnes commencent à apparaître. Le christianisme, notamment par le biais des Évangiles canoniques, met en exergue certaines femmes notables, à l’instar de Marie-Madeleine ou de Lydie, présentées comme de ferventes croyantes.
Découvrir une tombe datant du Ve siècle, abritant le corps d’une femme dans des dispositions analogues à celles attribuées aux moines ascètes, est une occurrence rare. De quoi raviver le débat sur la place des figures féminines, tandis que le christianisme s’implantait comme une religion majeure au sortir de l’Antiquité.