Les scientifiques savent depuis longtemps que la fonte des glaces provoquée par le réchauffement climatique a pour effet d’accélérer un peu plus… le réchauffement climatique. Et des mesures qu’ils viennent de faire sur un glacier de l’Arctique révèlent un processus qui leur était inconnu et qui pourrait amplifier le phénomène.
La fontefonte du permafrost – ce sol réputé toujours gelé – sous l’effet du réchauffement climatique anthropique est à l’origine d’émissions de méthane (CH4). Les scientifiques le savent. Et c’est embêtant parce que le méthane est, lui-même, un puissant gaz à effet de serre qui, une fois dans l’atmosphère, contribue à accélérer un peu plus la hausse des températures. Mais de jeunes chercheurs du Centre for ice, cryosphere, carbon and climate (iC3, Norvège) rapportent aujourd’hui qu’ils ont observé quelque chose de plus embêtant encore.
Du méthane dans les eaux de fonte des glaciers
Des mois entiers, ils ont vécu dans une cabane isolée, quelque part au Svalbard (Norvège) pour étudier un petit glacier de vallée, le Vallåkrabreen, avec dans l’idée de déterminer si oui ou non, les eaux de fonte participent au transfert du méthane du sol vers l’atmosphère. Dans la revue Biogeosciences, ils racontent comment ils ont mesuré les niveaux de méthane dans les sources d’eau souterraine et la rivière de fonte qui s’écoule du glacier. Et stupeur, les concentrations de méthane qu’ils ont relevées étaient jusqu’à 800 fois supérieures au niveau d’équilibre atmosphérique !
Une analyse isotopique plus tard, les chercheurs montrent que ce méthane n’a pas été produit par une activité microbienne sous la glace. Mais qu’il est bien d’origine géologique. « Libéré lorsque le glacier recule et que l’eau de fonte glaciaire s’écoule à travers les fractures de la roche », précise Gabrielle Kleber, dans un communiqué de l’iC3.
Les glaciers, une source substantielle de méthane
Entre juin et octobre chaque année, la rivière de fonte du Vallåkrabreen libère à elle seule environ 616 kilogrammeskilogrammes de méthane dans notre atmosphère. C’est 63 % des émissionsémissions totales du bassin versantbassin versant du glacier. « Les glaciers agissent comme des couvercles géants, emprisonnant le méthane sous terreterre. Mais lorsqu’ils fondent, l’eau s’écoule à travers les fissures du substratsubstrat rocheux, transportant le gaz à la surface. On peut considérer cela comme un processus naturel de « fracturation hydrauliquefracturation hydraulique » ou comme nous l’avons appelé, de « fracturation glaciaire« », explique Leonard Magerl.
Si des processus similaires se produisent ailleurs, les émissions de méthane des glaciers pourraient être une source substantielle et jusqu’alors non comptabilisée d’émissions de gaz à effet de serre dans l’Arctique. Un méthane qui pourrait alimenter ce que les scientifiques appellent une boucle de rétroactionboucle de rétroaction. Comprenez que les glaciers fondent sous l’effet du réchauffement. En fondant, ils libèrent du méthane qui accélère le réchauffement. Alors les glaciers fondent plus et libèrent plus de méthane et fondent plus et… etc.