La politique de GoogleGoogle concernant la collecte de données en ligne connaît un tournant significatif. Depuis avril 2025, l’entreprise autorise officiellement le fingerprinting, une méthode de traçage numérique permettant d’identifier les utilisateurs sur internet. Ce changement marque un revirement notable pour Google qui avait pourtant qualifié cette pratique de « contraire au choix des utilisateurs » en 2019. Cette décision soulève des questions fondamentales sur l’équilibre entre rentabilité publicitaire et respect de la vie privée des internautes.
Le fingerprinting numérique, cette technologie controversée
Le fingerprinting consiste à recueillir diverses informations techniques sur l’appareil et le navigateur d’un utilisateur pour créer une « empreinte digitaleempreinte digitale » unique. Contrairement aux cookies que l’on peut facilement supprimer, cette méthode compile des données comme la taille d’écran, les paramètres de langue, le type de navigateur, le niveau de batterie et même le fuseaufuseau horaire.
Martin Thomson, ingénieur chez Mozilla, concurrent direct de Google, explique le problème fondamental : « En autorisant le fingerprinting, Google s’octroie – ainsi qu’à l’industrie publicitaire qu’il domine – la permission d’utiliser une forme de traçage que les utilisateurs peuvent difficilement bloquer ». Cette méthode de collecte se distingue des cookies traditionnels par son caractère quasi invisible pour l’utilisateur moyen.
L’adresse IP, cet identifiant unique de chaque appareil connecté, fait également partie des données nouvellement autorisées pour le ciblage publicitaire. Ces informations, bien que nécessaires au fonctionnement des sites web, deviennent problématiques lorsqu’elles sont exploitées à des fins publicitaires sans consentement explicite des utilisateurs.
La justification économique face aux préoccupations éthiques
Google défend sa nouvelle position en évoquant l’évolution des usages numériques. Selon l’entreprise, la multiplication des appareils connectés comme les téléviseurs intelligentstéléviseurs intelligents et les consoles rend plus difficile le ciblage publicitaire traditionnel basé sur les cookies. Dans un communiqué adressé à la BBC, Google affirme que « les technologies améliorant la confidentialitéconfidentialité offrent de nouvelles façons pour nos partenaires de réussir sur les plateformes émergentes… sans compromettre la vie privée des utilisateurs ».
Cette justification ne convainc pas Lena Cohen, spécialiste technologique à l’Electronic Frontier FoundationElectronic Frontier Foundation, qui dénonce « la priorisation continue des profits au détriment de la vie privée » par Google. Elle souligne également que « les mêmes techniques de traçage que Google juge essentielles pour la publicité en ligne exposent également les informations sensibles des individus aux courtiers en données, aux entreprises de surveillance et aux forces de l’ordre ».
Pete Wallace, expert de la société de technologie publicitaire GumGum, considère que le fingerprinting se situe dans « une zone grise » de la protection des données. Il observe un changement d’orientation dans l’industrie, passant d’une « approche centrée sur le consommateur à une approche centrée sur l’entreprise » concernant l’utilisation des données personnelles.
Les régulateurs s’inquiètent des implications sur la protection des données
L’autorité britannique de protection des données, l’Information Commissioner’s Office (ICO), a exprimé de sérieuses préoccupations concernant cette évolution. Dans un article publié en décembre, Stephen Almond, directeur exécutif des risques réglementaires de l’ICO, a qualifié ce changement d’« irresponsable », ajoutant que le fingerprinting « n’est pas un moyen équitable de suivre les utilisateurs en ligne car il réduit probablement le choix et le contrôle des personnes sur la manière dont leurs informations sont collectées ».
L’organisme de régulation britannique avertit que les entreprises optant pour cette technologie devront attester leur conformité avec les lois sur la protection des données au Royaume-Uni. Selon l’ICO, « compte tenu de notre compréhension de la façon dont les techniques de fingerprinting sont actuellement utilisées pour la publicité, c’est une barre à franchir hautement placée ».
Google affirme poursuivre le dialogue avec l’ICO et souligne que « les signaux de données comme les adresses IP sont déjà couramment utilisés par d’autres acteurs de l’industrie, et Google les utilise de manière responsable pour lutter contre la fraude depuis des années. L’entreprise maintient qu’elle continue « de donner aux utilisateurs le choix de recevoir ou non des publicités personnalisées ».
L’avenir de la publicité numérique à l’épreuve de l’éthique
Ce débat met en lumièrelumière la tension permanente entre le modèle économique dominant d’internet, basé sur la publicité ciblée et les attentes croissantes des utilisateurs en matièrematière de protection de la vie privée. Si la publicité permet à de nombreux sites web de rester gratuits, elle impose souvent aux utilisateurs de sacrifier leurs données personnelles en échange de cet accès.
Des alternatives comme la publicité contextuelle, qui cible les annonces en fonction du contenu consulté plutôt que du profil de l’utilisateur, gagnent en popularité. Cette approche, défendue par des entreprises comme GumGum, représente potentiellement un compromis entre efficacité publicitaire et respect de la vie privée.
L’équilibre entre innovation technologique, viabilité économique et droits fondamentaux des utilisateurs reste le défi central que l’industrie numérique devra résoudre dans les années à venir.